DNA a écrit :Dissiper le brouillard
Plongés dans une série poussive depuis trois mois, les joueurs du Racing ont l'impérieuse nécessité de décrocher leur première victoire en 2009 pour ne pas perdre de vue le podium, l'objectif de la saison, et, accessoirement, sauver la tête de leur coach.
Au-delà d'une partie du somptueux palmarès construit du côté d'Anfield Road, dont la fameuse entrée surplombée du « You'll never walk alone » porte son nom, Bill Shankly a eu cette phrase pour synthétiser la passion du ballon rond : « Le foot n'est pas une question de vie ou de mort. C'est bien plus important que cela. » Celui qui plaçait ainsi un jeu de pousse-ballon parmi les plus grands terrains d'expression humaine est parvenu dans les années 60 à redonner au Liverpool FC sa suprématie sur la ville industrieuse du nord d'Angleterre, aux dépens d'Everton. Depuis la balance des forces reste invariablement, ou presque la même, au détriment des Blues, au bénéfice des Reds.
Sur les 12 derniers matches, le Racing est 18e
A l'aune du passé, là -bas, la passion nourrit un présent furieusement exaltant. Ce soir, ici dans le temple du football alsacien, les joueurs de Jean-Marc Furlan ne se reconnaîtraient pas dans la sentence de Bill Shankly. Face à Brest, ils se consacrent à un match où il sera un peu question de vie ou de mort. Jean-Marc Furlan est en danger. Le successeur de Jean-Pierre Papin ne risque assurément pas son existence lors du 60e match de championnat qu'il dirige. Mais comme les tics du langage de la tragédie ont volontiers cours dans les affaires du plus hégémonique des sports, sa tête est sur le billot. La vie de Jean-Marc Furlan, entraîneur du Racing, s'arrêtera bel et bien si le verdict se révèle défavorable. Le principal intéressé le sait. « Après ce que l'on a vécu la saison dernière (ndlr : conclue par onze défaites en onze matches), il est extrêmement difficile pour moi de convaincre que cela ne se reproduit pas une seconde fois, souligne le technicien surexposé en constatant avec lucidité qu'il n'y en aurait pas une 3e. Avec le niveau d'exigence locale, je n'ai peut-être pas assez souligné que le club est désormais sain. Si on réussit le pari de la montée, ce sera un exploit. » Le problème, c'est que le rythme affiché en ce mois de janvier est bien loin des canons exigés pour reprendre l'ascenseur en mai prochain. Ses protégés ont joué trois matches, décroché deux points et ont parfois fait peine à voir. En appeler à des circonstances atténuantes a pu s'inscrire dans une forme de légitimité. « Il y a des arguments lourds et forts avec l'absence de Marcos, Shereni et Pelé, rappelle « JMF ». Des cadres ont manqué depuis trois mois ». Le problème, c'est qu'au sein d'un foot moderne qui assure un taux de remplissage confortable aux infirmeries, il en manquera jusqu'à la fin de saison. Et le Racing n'en finit pas de ne pas avancer : ses 12 points sur les 12 derniers matches le placent à la 18e place d'un classement partiel, seuls Reims (10 points) et Ajaccio (8 points) ayant fait pire dans l'intervalle. En face, le Stade Brestois n'a, a priori, rien du redoutable bourreau prêt à mettre fin au bail du technicien « cheesy » malgré les circonstances, l'immuable et agréable sourire collé aux lèvres. Mais avec 19 de ses 26 points décrochés dans cette période alsacienne funeste, la bande à Baticle déboule sur un rythme de TGV quand son homologue strasbourgeois a celui d'un tortillard.
Brest, version Baticle, s'est déplacé et a perdu trois fois
Source d'optimisme, les Bretons ont perdu de vue leur spécificité initiale, en même temps que... leur entraîneur du début de saison, Pascal Janin. Encore 6e de L 2 en déplacement, Brest, version Baticle, a voyagé et perdu trois fois. On se rattrape aux branches qu'on peut, comme à la (très) vague réaction aperçue, à Bastia, après la pause. « J'ai changé d'approche avec le match de Bastia, garantit l'entraîneur en sursis. Je ressens autour de moi la pression. Mais je ne vis pas la situation comme ça, parce qu'il y a des gens qui comptent sur moi. Les joueurs ont donné toutes leurs forces, ils ont marqué leur adhésion au staff technique. » Il manque néanmoins cruellement de victoires pour en faire des prosélytes efficaces. Et celle face à Brest s'avère indispensable pour donner du répit à leur guide. En fait, les Strasbourgeois ont aussi une occasion, impérative à saisir, de se montrer de fervents adeptes de Shankly dont l'autre sentence sur le foot dit ceci : « Dans le football, il y a une sainte trinité, les joueurs, l'entraîneur et les supporteurs. Les présidents n'en font pas partie et sont juste là pour signer les chèques. »
En cas de catastrophe tout à l'heure, celui du Racing s'invitera assurément pour modifier le plan de la table divine.