www.lesechos.fr a écrit :Afflelou n'est plus « fou de foot »
Le célèbre opticien, Alain Afflelou déçu par son partenariat avec les grands clubs de football, se replie sur la voile et le tennis.
« Afflelou et moi, on est fou de foot. » Le générique de Canal+ Espagne, adapté par Alain Afflelou, le célèbre opticien, pour vendre ses lunettes sur le marché français, résume bien la passion pour le ballon rond de ce pied noir de cinquante-sept ans, rapatrié à Bordeaux après les événements d'Algérie, qui a passé le concours d'entrée de l'Ecole optique à Paris « pour voyager ». A la suite d'un parcours professionnel sans faute depuis l'ouverture de son premier magasin en 1972, l'homme se retrouve aujourd'hui à la tête d'une équipe de 800 magasins franchisés dans l'Hexagone, mais aussi en Belgique, en Espagne, au Luxembourg, au Maroc, en Suisse pour un chiffre d'affaires supérieur à 500 millions d'euros pour l'exercice 2005-2006 clôturé en avril prochain. Le succès, par contre, n'a pas toujours été au rendez-vous avec le ballon rond. « L'entreprise c'est du rationnel, on sait que 2+2, cela fait 4. Le foot, c'est de l'irrationnel puisque l'on compte sur le talent des joueurs, lequel talent peut-être réel ou supposé, avéré en cours de saison ou en demi-teinte pour des raisons de fatigue, de blessure. Ce talent dépend aussi de l'intégration des joueurs dans une équipe de vingt joueurs, comment celle-ci sera managée par l'entraîneur, etc. », analyse-t-il. « S'il suffisait de dire qu'il faut être riche pour décrocher un titre de champion, il n'y aurait plus de sport. »
Heure de gloire
Cette « passion » démarre véritablement en 1986, quand il devient sponsor maillot de l'AS Monaco. « Il y avait une opportunité financière et le club avait une très belle image », raconte Alain Afflelou. La deuxième année du contrat, l'équipe est championne de France. Mais, « les dirigeants n'ayant pas respecté les termes du contrat », l'opticien quitte la principauté pour rejoindre l'Olympique de Marseille de Bernard Tapie, qui obtient cette année là le titre (1989). La saison suivante, la société est partenaire pour une saison du Paris-Saint-Germain, avant de se lancer dans le basket en sponsorisant l'équipe féminine du Racing Club de France et le cyclisme avec Laurent Fignon, « seul coureur portant des lunettes dotées de verres spéciaux mais qui refusait de mettre en avant la marque ». A ses yeux, ce partenariat, comme celui du PSG, « n'est pas resté dans les annales du sponsoring ».
Le « coup de coeur » intervient avec les Girondins de Bordeaux. « Au début des années 1990, le club était à racheter. Le président Chaban-Delmas m'a proposé de le reprendre. J'ai participé au tour de table et pris dans la foulée la présidence pour cinq saisons (1991 à 1996) », raconte Alain Afflelou. Sous son ère, le club connaît son heure de gloire. « Champion de deuxième division la première année de ma présidence, nous avons disputé la finale européenne de la Coupe de l'UEFA que l'on a perdue contre le Bayern de Munich, la dernière année, avec des joueurs emblématiques comme Zidane, que j'avais fait venir de Cannes, Dugarry et Lizarazu .» Il quitte néanmoins Bordeaux.
« Comme toute passion, cela finit par se ternir, dit-il. J'ai découvert les problèmes de rivalité, la jalousie. On a du mal à imaginer ce que peut représenter une présidence de club pour la vie de quelqu'un : la médiatisation immédiate, la notoriété, le pouvoir. Un président de club, c'est comme un homme politique. Moi, je n'avais pas besoin de cela, j'étais déjà connu, c'est pourquoi on m'avait confié la présidence. En revanche, cela suscite des appétits. Quand j'ai vu qu'il commençait à y avoir des problèmes, j'ai dit : cela suffit. Je n'allais pas me battre pour un loisir. » Afflelou est toujours aussi « fou de foot ». L'expérience bordelaise ne l'a pas rassasié. Il prend dans la foulée la présidence du petit club de Créteil, en région parisienne, « à titre amical ». Le club qui végétait en Nationale remonte en Division 2, où il évolue toujours.
Sportifs de haut niveau
C'est au tour de Strasbourg de faire les yeux doux à l'opticien. « Je suis sponsor du maillot du club alsacien cette saison et, en novembre dernier, alors que j'étais en cure à Quiberon, j'ai reçu un coup de fil du directeur général et actionnaire du club, Marc Keller, souhaitant me rencontrer pour que je m'implique plus dans le club, qui ne va pas très bien au plan sportif. On était un lundi et, le vendredi, le DG venait déjeuner avec moi en compagnie du président du conseil de surveillance, Patrick Hadler ; tous les deux m'ont proposé de reprendre le club. A l'affectif, à l'impulsion, j'ai dit oui spontanément. » Le mardi suivant, Alain Afflelou et son principal collaborateur font un aller et retour en avion à Strasbourg. « Dès mon arrivée, j'ai été harcelé par la presse locale. Je ne pouvais rien dire tant que cela n'était pas signé mais, sur place, les dirigeants du club ne se privaient pas d'annoncer ma désignation. Finalement, au cours d'une miniconférence de presse, j'ai annoncé que, lors d'une assemblée générale extraordinaire, il serait procédé à la cession de 51 % des actions du club à mon profit et que je prendrais la présidence. Tout roulait, lorsque j'ai appris par l'avocat du club qu'une nouvelle offre de reprise du club était faite par l'un des actionnaires NDLR : Philippe Ginestet. J'ai tout envoyé balader. »
L'opticien reste sponsor maillot du club pour trois ans, « à condition que celui-ci ne soit pas rétrogradé en Division 2 ». Mais le foot, cette fois, « c'est bien fini », assure-t-il, préférant la voile en sponsorisant, depuis trois ans, la Solitaire du « Figaro » Afflelou, « où l'on a de belles retombées médiatiques », le tennis avec Roland-Garros, où l'opticien est l'un des 8 partenaires officiels du tournoi, et des sportifs de haut niveau comme Amélie Mauresmo et Murielle Hurtis pour la campagne de « lentilles éphémères que nous avons lancée ». Le coût global de cette politique est inférieur à 3 millions d'euros.